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CJUE 14 mars 2019 n° C-372/18 : les revenus du patrimoine de résidents français affiliés au régime de sécurité sociale suisse ne peuvent pas être soumis à des contributions sociales visant à financer des prestations de sécurité sociale en France.

par | Avr 9, 2019 | Actualités

Cour de justice de l’Union européenne
COMMUNIQUE DE PRESSE n° 32/19
Luxembourg, le 14 mars 2019
Arrêt dans l’affaire C-372/18
Ministre de l’Action et des Comptes publics/M. et Mme Raymond Dreyer

 

Les revenus du patrimoine de résidents français affiliés au régime de sécurité sociale suisse ne peuvent pas être soumis à des contributions sociales visant à financer des prestations de sécurité sociale en France

M. et Madame Raymond Dreyer sont des résidents fiscaux français affiliés au régime de sécurité sociale suisse, M. Dreyer ayant effectué sa carrière professionnelle en Suisse. En 2016, l’administration fiscale française a assujetti les époux Dreyer, au titre de revenus du patrimoine perçus en France au cours de l’année 2015, à des contributions et prélèvements affectés, notamment, à la caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

Considérant que les prestations gérées par cet organisme et financées par les contributions et prélèvements en cause sont des prestations de sécurité sociale, les époux Dreyer ont contesté, devant la justice française, leur assujettissement à ces contributions et prélèvements, estimant que, puisqu’ils sont déjà affiliés au régime de sécurité sociale suisse, ils n’ont pas à contribuer au financement du régime de sécurité sociale français. En effet, le règlement de l’Union sur la coordination des systèmes de sécurité sociale 1 dispose que les personnes auxquelles il est applicable ne sont soumises qu’à la législation d’un seul État membre, la Suisse étant considérée à cet égard comme un État membre.

Saisie du litige opposant les époux Dreyer à l’administration fiscale française, la Cour administrative d’appel de Nancy (France) a exprimé des doutes sur la nature des prestations financées par les contributions et prélèvements affectés à la CNSA. Elle demande donc à la Cour de justice si ces prestations, à savoir l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) et la prestation compensatoire du handicap (PCH), peuvent être considérées comme des prestations de sécurité sociale.

Dans son arrêt de ce jour, la Cour rappelle qu’une prestation peut être considérée comme une prestation de sécurité sociale dans la mesure où, d’une part, elle est octroyée aux bénéficiaires en dehors de toute appréciation individuelle et discrétionnaire de leurs besoins personnels, sur la base d’une situation légalement définie (première condition), et où, d’autre part, elle se rapporte à l’un des risques visés par le règlement en cause (seconde condition).

La Cour rappelle également que la prise en compte des ressources du bénéficiaire aux seules fins du calcul du montant effectif des prestations sur la base de critères objectifs et légalement définis n’implique pas une appréciation individuelle des besoins personnels de ce bénéficiaire. Tel est le cas, selon la Cour, de l’APA et de la PCH, étant donné que la prise en compte des ressources du bénéficiaire ne concerne que les modalités de calcul de ces prestations, ces dernières devant être octroyées lorsque le demandeur remplit, indépendamment du niveau de ses ressources, les conditions qui ouvrent le droit aux prestations.

Dans ce contexte, la Cour précise que la nécessité d’évaluer, aux fins de l’octroi de l’APA et de la PCH, le degré de perte d’autonomie ou de handicap du demandeur n’implique pas non plus une appréciation individuelle des besoins personnels de ce demandeur. En effet, l’évaluation de la perte d’autonomie et du handicap est effectuée par un médecin ou un professionnel d’une équipe médico-sociale ou par une équipe pluridisciplinaire au regard de grilles, de listes et de référentiels prédéfinis, c’est à-dire à partir de critères objectifs et légalement définis qui, dès lors qu’ils sont remplis, ouvrent le droit à la prestation correspondante.

Enfin, la Cour considère que, dès lors qu’il résulte à la fois de son arrêt de ce jour et des constatations de la juridiction de renvoi que les deux conditions précitées sont remplies et que l’APA et la PCH sont des « prestations de sécurité sociale », il n’y a pas lieu de vérifier si ces deux prestations sont des « prestations spéciales en espèces à caractère non contributif » au sens du règlement, la Cour ayant déjà jugé que ces deux notions s’excluent mutuellement.

RAPPEL : Le renvoi préjudiciel permet aux juridictions des États membres, dans le cadre d’un litige dont elles sont saisies, d’interroger la Cour sur l’interprétation du droit de l’Union ou sur la validité d’un acte de l’Union. La Cour ne tranche pas le litige national. Il appartient à la juridiction nationale de résoudre l’affaire conformément à la décision de la Cour. Cette décision lie, de la même manière, les autres juridictions nationales qui seraient saisies d’un problème similaire.

Télécharger le communiqué de presse 32/12 CJUE.